LE PÈLERIN ET LES SEPT PRINCESSES – LA QUÊTE DES PIERRES DE LUNE (CHP11)

Le pèlerin et les sept princesses, la quête des pierres de lune

Chapitre 11 – La princesse

J’étais toujours sidéré par la sentence prononcée par la reine au matin. Mille et une pensées traversaient mon esprit perturbé. Pourquoi étais-je arrivé dans cet endroit affreux ? Comment prévenir ma mère et mes proches ? Allaient-ils vraiment m’exécuter à l’aube ? Étais-je en train de rêver ? Ou tombé dans un comas profond suite à mon accident dans la cabane de chasse ? Et si tout cela n’était qu’un mauvais rêve ? Allais-je me réveiller dans un lit d’hôpital ? À la limite de la folie, je me réfugiai dans la seule chose qui me restait, à savoir la prière. J’invoquais alors une partie de la journée le secours du ciel, car il n’y avait plus qu’une intervention céleste pour me sauver de ce bourbier inextricable. J’adressais mes prières à qui voulait bien les entendre durant toute la nuit.
Le temps passa si vite ! De la petite lucarne de mon cachot, j’apercevais au loin une lumière poindre à l’horizon, annonçant le lever du soleil et signant par la même mon arrêt de mort. Le bruit d’une clé dans le verrou de la porte de ma cellule me fit brusquement sursauter. Ils venaient déjà me chercher ! Par instinct, je me recroquevillai sur moi-même dans le coin le plus obscure de mon cachot, les jambes pliées et la tête dans les genoux. Le grincement de la porte et quelques pas lugubres m’annonçaient que mes tourments prendraient fin sur l’échafaud. Une main froide se posa sur mon épaule : « Il faut faire vite, vous devez vous enfuir pendant qu’il en est encore temps ! murmura une petite voix à mon oreille. ».
Surpris, je me redressai et je vis la sœur de la reine penchée sur moi, celle-là même qui avait tenu tête à sa souveraine et pris ma défense dans la salle d’audience. « Levez-vous je vous prie. ». Je m’exécutai sans rien dire, ne comprenant pas ce qui se tramait. Elle coupa les liens qui m’entravaient et me prit par la main, me conduisant hors de la prison. Sur le chemin, je vis les gardes enivrés qui ronflaient bruyamment affalés sur leurs chaises ou qui dormaient à même le sol. Nous marchâmes un bon moment dans un dédale de ruelles obscures et désertes avant de nous arrêter devant ce qui ressemblait à un puits désaffecté. Entre-temps, j’avais par miracle retrouvé mes esprits et je savais tout à coup, au fond de moi, que le ciel m’avait bel et bien entendu.
« Écoutez-moi attentivement je vous prie ! Vous allez descendre dans ce puits. Au fond, grattez le sable sous vos pieds. Vous trouverez une trappe qui donne accès à un tunnel étroit qui mène hors de la cité, déclara-t-elle la voix tremblante.
– Vous ne venez pas avec moi ? répliquai-je étonné.
– Non, je dois rester ici pour expier mes fautes et pour tenter de raisonner ma sœur.
– Mais si elle apprenait ce que vous avez fait pour moi, vous pourriez en mourir !
– Non, ne vous inquiétez pas. Ce pouvoir sur moi, elle ne le possède pas, pas encore du moins.
– Vous me sauvez la vie, comment vous remercier ?
– Restez en vie ! C’est comme ça que vous pourrez me remercier. Puis, elle retira la bague en argent dans laquelle était enchâssée une pierre de lune noire qu’elle portait à son annulaire droit. Elle la glissa dans ma main et elle continua. Nous sommes sept princesses à qui le roi à léguer son royaume. Je suis la deuxième et vous connaissez déjà la première née.
– La reine !
– C’est exact, dit-elle en baissant les yeux. Vous savez, ma sœur était une bonne personne avant. Mais avec le départ de notre père, son cœur s’est endurci et a été progressivement corrompu par le pouvoir et les richesses. Malheureusement pour nous, l’avidité et les désirs insatiables ont poussé la reine à chasser mes sœurs hors de la cité.
– Je ne comprends pas bien, qu’attendez-vous de moi ?
– Retrouvez ma jeune sœur, la troisième princesse. Elle se cache dans une grande forêt située à l’Ouest. Elle vous aidera à trouver un moyen de rentrer chez vous. Maintenant, fuyez ! ».
Je sautai dans le puits sans me faire prier. En bas, je relevai la tête pour faire un dernier signe à ma bienfaitrice, mais elle n’était plus là. Je grattai le sol et je trouvai aussitôt une trappe en bois que j’ouvrai sans peine. Une petite échelle me permit de descendre dans un couloir obscure. Je me faufilai à l’intérieur et me dirigeai à tâtons droit devant moi pendant un long moment, jusqu’à ce que je sois stoppé par une plaque d’acier. Je la poussai de toutes mes forces et après quelques efforts, elle finit par céder. Le tunnel débouchait dans une petite cavité souterraine. Au-dessus de moi filtraient des rayons lumineux qui indiquaient la sortie. J’escaladai la paroi et je dégageai les quelques pierres qui me séparaient du grand air. J’émergeai en plein désert alors qu’un soleil rougeoyant entamait sa course dans le ciel. Mon cœur était empli de reconnaissance, un prix qui me parut dérisoire pour la liberté que je venais de gagner !


Extrait du livre Le pèlerin et les sept princesses, la quête des pierres de lune, J.M. Montsalvat, 2022. À paraître fin septembre 2022.